Ces histoires bien sûr sont enregistrées à La Société Des Gens de Lettres, à Paris. Vous ne pouvez donc les utiliser qu'avec mon accord. Merci de votre compréhension.

samedi 15 août 2015

Le Noël de Hans



Le Noël de Hans


         La neige avait, depuis plus d’une semaine déjà, recouvert les toits des maisons d’Ostende. Les cheminées fumaient. A l’intérieur des logis, on se préparait à fêter le réveillon de Noël, le lendemain soir et les gouvernantes s’affairaient de plus belle pour les derniers préparatifs. Les rôtis, les volailles et les bonnes bouteilles de vin remplissaient les celliers : On se délectait par avance des bons repas que l’on allait partager.
         Delors, Hans, petit garçon perdu,  grelottait, recroquevillé sous un porche. Il était seul. Il avait toujours vécu seul, dans la rue, ignoré de tous, n’ayant pour seule ressource que sa débrouillardise qui lui permettait chaque jour de trouver de quoi manger. Mais ce soir, son courage l’abandonnait. Il n’avait plus la force de lutter et ses yeux se fermaient lentement, régulièrement, tandis que le sommeil et l’oubli le gagnaient imperceptiblement.
         Mette, Mette la bien portante, aux beaux cheveux courts et blonds et au visage rieur, connue de tous pour sa gentillesse et son dévouement, rentrait des course, son panier à la main, lorsqu’elle aperçut le petit garçon dans son recoin, à l’écart des passants. Elle s’approcha de lui : « Bonjour… » Hans ouvrit les yeux. « Je m’appelle Mette, tu as l’air d’avoir froid. Que fais-tu là tout seul ? » Il la regarda, un peu inquiet, reconnaissant cependant de sa bienveillance mais ne répondit pas. « Comment t’appelles-tu ?
   Hans, finit-il par concéder après quelques minutes d’hésitation.
   Tu as de la famille ?
   Non.
   Tu ne vas pas rester tout seul comme cela ! Tu vas venir avec moi. Nous fêterons Noël ensemble.
    Je ne peux pas.
   Et pourquoi donc ?
   Parce que mes chaussettes sont trouées et le Père Noël ne voudra pas de moi.
   Mais si ! Le Père Noël aime tous les enfants !
   Pas moi. Il ne m’aime pas. Je ne veux pas.
Et il tourna la tête. Elle n’insista pas et revint peu après avec une petite fille.
« Bonjour Hans ! » Le regard du garçon s’illumina. « Je m’appelle Kristen. Si tu veux, nous irons ensemble acheter des chaussettes alors tu pourras venir passer Noël avec nous.
   Je ne veux pas aller au magasin. J’aurais trop honte ;
   Alors je t’en tricoterai. Mais s’il te plait, viens avec nous. »
Hans finit par se laisser convaincre, trop las pour refuser et heureux tout de même que l’on s’occupe de lui. Il suivit Mette et Kristen.
         L’orphelinat se situait non loin de là. Hans y dîna d’un repas frugal : Il ne pouvait rien avaler. Il dormit très tôt, dans un lit de fortune, dans une modeste petite pièce. Il ne pensait pas à Noël.
         Kristen travailla toute la nuit. Et le matin, au réveil, elle lui apporta son ouvrage. Soulagé, le petit garçon accepta son cadeau. Mais il ne se leva pas : Il était trop faible. Alors elle lui expliqua : « Tu vois, ce soir nous mettons nos chaussettes pendues à la cheminée, pour les cadeaux. J’en mettrai une pour toi. Si tu acceptes bien sûr ! » Hans approuva. « Alors le Père Noël t’apportera un cadeau à toi aussi. Je te laisse, tu es fatigué. Je reviendrai te voir. » Rassuré, Hans s’endormit peu après. Il se reposa, dormant la plupart du temps, jusqu’au lendemain matin, jour de Noël.
         Le Père Noël était bien passé. Dans une joyeuse cohue, les enfants de l’orphelinat ouvraient leurs cadeaux. Il y avait des voitures en bois, des avions, des poupées de chiffon et des friandises en abondance pour tout le monde. Tous riaient et parlaient bien fort. Le bonheur était palpable. Hans, accompagné de Mette, s’approcha de sa chaussette. Il y découvrit une clé. Et comme il semblait un peu décontenancé, Mette lui expliqua : «  C’est la clé de ta nouvelle chambre. Désormais, tu vivras avec nous. Viens, je vais te montrer le chemin. »
         Elle le laissa ouvrir la porte et il découvrit, émerveillé, pour lui tout seul, une chambre propre avec un vrai lit, une grande armoire, une grande table et une de chevet plus petite, une chaise et partout, sur le lit, sur la grande table, par terre, des paquets cadeaux, petits et grands, de toutes formes et de toutes les couleurs. Puis il remarqua, au-dessus de la table de chevet, suspendue comme par un fil invisible, une étoile qui brillaient doucement. « C’est une vraie ? Demanda-t-il à Mette ?
   Bien sûr que c’est une vraie.
   On en a tous une, chacun dans notre chambre, lui dit Kristen. Entoure-la de tes mains, tu verras. »
Hans enveloppa l’étoile de ses mains et une chaleur réconfortante envahit son corps. Son esprit s’apaisa également. Il se sentait rassuré à présent. « Ça fait du bien n’est-ce pas ? lui dit en souriant Kristen. Maintenant, quand tu auras froid ou peur, elle sera toujours là pour te réconforter.
   Allez ! l’interrompit Mette. Assez parlé ! On va te laisser déballer tes cadeaux. Tu nous retrouveras après, pour le petit déjeuner. »
Et elles le laissèrent en lui lançant gaiement « A tout à l’heure ! ». Lorsqu’elles furent parties, que la porte fut refermée et qu’il se retrouva seul, une grande inquiétude le submergea soudain : « Et si tout cela n’était qu’un rêve ? Si tout disparaissait d’un coup et que je me retrouve de nouveau dans la rue ? » Alors il se tourna vers l’étoile. Il vit qu’elle était toujours là, flottant au-dessus de la table de chevet et il se tranquillisa.